Par Sylvère Sakubu*

Un livre-témoignage d’un vécu psycho traumatique profond survenu lors de la fondation (toute la période d’enfance) d’un enfant qui structure sa personnalité future, se combinant avec une phase transitionnelle (période d’adolescence) vers l’âge adulte et le tout dans un environnement abominablement déstructurant.
Un livre psychothérapique, ayant permis à l’auteure de mettre les mots sur ses maux (« mettre les mots sur l’horreur »), constituant ainsi une abréaction et une catharsis émotionnelle. Et cela a pu fonctionner parce que l’auteure a pu bénéficier des référentiels solides (un bon milieu parental très structurant, une affection parentale impeccable et responsable, un amour fraternel et une dynamique familiale très fonctionnels…)
Un livre démontrant l’existence de plusieurs tuteurs de résilience à la hauteur tout autour de l’auteure, indépendamment de leurs « ethnies », de leurs « régions », de leurs catégories socioprofessionnelles, de leur nationalité avec à la tête une « sacrée maman battante».

Un livre qui montre la perplexité et complexité des conséquences dramatiques entrainées par une poignée d’irresponsables assoiffés du pouvoir qui use, qui corrompt et entrainant une dépendance toxicomaniaque à celui-ci. Une poignée de gens qui manipule, qui instrumentalise des « ethnies », des  « régions », bref des réalités sociologiques et diverses constituant intrinsèquement une harmonie  et non un antagonisme pour plonger et rouler dans la farine toute une nation, tout un peuple, tout un pays avec des conséquences multiples et multiformes incalculables qui se répercuteront sur des générations.

Dans sa « nouvelle vie » en Belgique, supposée être sereine et tranquille, les signes psycho traumatiques restent actifs et vifs avec un cauchemar récidivant perturbant la quiétude de son sommeil qui devrait être réparateur. Les conséquences sur sa santé mentale dureront et sont encore réactivées par l’existence du lieu du crime (Karuzi) et des auteurs et leurs complices des assassinats des siens jamais nommés par l’auteure. Ces conséquences sont aussi valables pour tous ceux qui ont vécu des situations dramatiques similaires. Même la mère de l’auteure le mentionne : « rien ne t’attache encore à ce pays, va, vis et ne reviens jamais »  et l’auteure l’admet : « un travail sur soi-même, qui sera peut-être long ». Et pourtant, c’est ce pays qui est l’a vu naître, lieu de ses ancêtres, auquel l’auteure a tous les droits en tant que burundaise à 100%. 

L’Ubuntu habite réellement l’auteure de la cicatrice. Puisse cet Ubuntu habiter tous les êtres de la planète malgré les adversités inhérentes à la vie.

 Je souhaite à l’auteure le rétablissement total de sa santé mentale  ainsi que celui de tous ceux qui ont été affectés par la barbarie de leurs semblables. 
 

*Dr. S Sakubu actuellement enseignant-chercheur à temps plein à l’Université du Burundi depuis 2007 en même temps clinicien. Psychiatre de formation, psychothérapeute systémique (càd d’orientation familiale) avec une Maîtrise en Neurophysiologie. Après la faculté de Médecine de Bujumbura, j’ai exercé (8 ans) au Centre Neuropsychiatrique de Kamenge (CNPK), avec une inclinaison sur des questions de traumas et traumatismes psychiques et ma mémoire de spécialisation en 2006 à Dakar a porté sur « les troubles psychiques chez les enfants anciens soldats burundais »